lundi 5 janvier 2009

Argent sale


Potosi est réputée pour la beauté de son architecture qui lui vaut de figurer sur la liste du patrimoine mondial de l’humanité de l’Unesco. Cette richesse architecturale n’est que justice quand on sait que cette ville a litteralement changé la face du monde, tout du moins de l’Europe. Les mines de Potosi, riches en argent et autres métaux, ont fait la richesse de l’Espagne et, par contagion, de l’Europe entière.





Mais cette époque est maintenant révolue, les ressources se sont peu à peu épuisées, et les mines de potosi n’intéressent plus grand monde.
Pourtant, les mines sont encore en activités... pour le meilleur et pour le pire. Ici, pas de multinationale minière comme il est si courant d’en voir dans les mines du monde entier : pas assez rentable. C’est un système de coopérative qui s’y est substitué. Les mineurs, salariés ou à leur compte, apporte leur minerai à des raffineries qui se chargent d’isoler argent, zinc ou autre métal semi-précieux.


Mais revenons-en à notre visite avec un Sylvain bien malade et particulièrement tétu (qui n’envisage pas de ne pas venir...) après une tartiflette avariée (cf. épisode précédent).


Avant la visite, le guide nous amène acheter quelques cadeaux pour les mineurs que nous croiserions. Nous avons le choix entre des cigarettes, de l’alcool à 96°, des feuilles de coca ou de la dynamite. Je demande à Amélie d’éviter alcool et cigarettes, n’ayant pas envie de contribuer à leur consommation.



Nous partons ensuite sur le site à prêt de 4300 mètres d’altitude. Vous l’aurait compris : il fait très froid en extérieur et l’air est bien peu chargé en oxygène, essouflement garanti à la première côte. Nous pénétrons dans la mine à la lumière de lanternes encombrantes et pourtant bien peu efficaces.
Au bout de quelques mètres déjà il faut baisser la tête. Tête que nous ne redresserons qu’à de rares occasions, l’essentiel de la visite (et donc le quotidien des mineurs) se faisant tête baissée, comme pour rendre encore plus pénible les conditions de travail de ces pauvres gens.


Plus nous nous enfonçons dans les entrailles du Cerro Rico, cette montagne aux couleurs Arc en ciel vue de l’extérieur, plus il fait chaud, l’oxygène se fait rare et la poussière omniprésente.
Dans ces conditions, la visite elle-même est loin d’être une partie de plaisir, et je penne au point de m’asseoir à la moindre pause de quelques secondes destinées à vérifier que tout le monde suit. J'étais vraiment complètement "debil" (cf. un dictionnaire d'espagnol. Quoique un dictionnaire de français pourrait peut-être suffire...). Pour sa décharge, Sylvain est vraiment malade (estomac vide et avec de la température+++). Alors imaginez un peu y donner des coups de pioche...
Nous rencontrons une poignée de mineurs venus risquer leur vie malgré la chute des cours mondiaux de métaux due à la crise actuelle.
Ils sont jeunes, la plupart ont moins de trente ans, et pour cause... Il est de notoriété publique que la majorité des mineurs meurent avant 10 ans de travail, principalement de pneumonie ou d’accidents (dynamite trop prompte à exploser, poche de gaz, chute de pierres...). 5 morts par mois d’accidents en tous genres. Et nous voilà à prendre des photos de ces gens, leur « offrir » quelques feuilles de coca, et moi à m’affaler par terre trop faible que j’étais pour me tenir debout (ou plutôt vouté).



Nous nous sentons génés, un peu « voyeurs », et les échanges avec les mineurs sont rares. Et que dire du fait d’avoir refusé l’achat d’alcool et de cigarettes. Face à la réalité de cette vie, voilà des principes qui ne valent pas grand chose. Surtout que l’air respiré à longueur de journée par les mineurs est sans commune mesure bien pire que 1 voire 2 paquets de clopes par jour !

Leur vie non plus ne vaut pas grand chose. Les salaires sont ridiculement bas au regard des risques encourus. Il y a certes des mineurs mieux payés que les autres, mais pour celà il faut 15 ans d’expérience, autrement dit faire partie de la minorité de mineurs qui survivent jusque là. Ironic, isn't it ?
Au moins pourrions nous penser que la condition de ces mineurs s’améliore. Que nenni...
Elles se dégradent. Les coopératives ne sont pas riches et n’investissent plus grand chose dans les infrastructures. Ainsi, quand auparavant des machines se chargeaient de sortir le minerai à l’extérieur de la mine, ce sont maintenant les dos des hommes qui s’en chargent...

L’argent ne fait décidemment pas le bonheur...

Salaire bas, espérance de vie plus basse encore, conditions de travail moyen-âgeuses... Mais alors pourquoi font-ils ça. Peut-être parce qu’ils n’ont pas vraiment le choix. Peut-être aussi parce qu’ils ont l’espoir de trouver un jour le bon filon, la veine qui les rendraient « riches », ou seulement moins pauvres.

Nous quittons la mine choqués. Mais nous ne regrettons pas cette visite qui nous aura ouvert les yeux sur une réalité, même si celle-ci n’est pas agréable.


Cette visite aurait logiquement due être contée dans le précédent article, soit celui de Noël, mais ce mélange des genres ne nous a pas paru très opportun, voire indécent, d’où l’article dédié.


Après une visite de la ville de Potosi, autrement plus agréable que celle de ses mines, nous rentrons sur Sucre pour nous apercevoir que la tartiflette avariée avait fait d’autres victimes. En l’occurence 2 français avec qui, au grand malheur de leurs estomacs, nous avions sympathisé. Mais, pas rancuniers, ils feront une jolie coupe à la jolie Amélie.



Et dans la famille Poissard je demande... le retrait en distributeur.

Et oui, on a encore droit à notre lot de galère. Un petit retrait de quelques 2000 bolivianos (200 euros) dans un DAB de la Banque Nationale de Bolivie, sauf que les billets ne sortirons jamais... A peine aurons nous droit à un « gracias por su preferencia » quelque peu ironique.

Bien sûr, vérification faite, le retrait à bien été enregistré sur notre compte sinon c’est pas drôle...

Les banques c’est comme les chevaux : elles sentent qu’on a la trouille, et les voilà qui ruent. Ras le bol des coups de fer au beau milieu du front...


2008 touche à sa fin... Nous partons rejoindre 2 vieilles connaissances du côté du salar d’Uyuni pour affronter ensemble les premiers instants de 2009.

Au passage, nous ne manquerons pas de traverser de superbes paysages, comme un avant-goût de ce qui nous attend à Uyuni...


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